L’heure juste sur le cannabis : Consommer ou ne pas consommer? Les jeunes font part de leurs perspectives

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La plupart de nos élèves n’ont pas l’âge légal pour consommer du cannabis et la majorité d’entre eux n’en consomment pas. La proportion de 22 % des élèves de l’Ontario1 (et de 18 % des élèves du Canada2) qui en consomment le font pour diverses raisons. Nous examinerons dans cette chronique certaines des raisons rapportées par les jeunes expliquant pourquoi ils consomment ou non du cannabis.

Le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances (à l’époque le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies) a mené des entrevues auprès de jeunes âgés de 14 à 19 ans, et a publié en 2017 les résultats de son étude, Les perceptions des jeunes Canadiens sur le cannabis.3 Il a également effectué une nouvelle ronde de collecte de données en 2020 axée sur les perceptions selon les genres, dont les résultats seront publiés dans un nouveau rapport.4 Cette chronique examine les données de 2017 et 2020.

Reconnaître la diversité inhérente chez les jeunes

Avant de commencer, il est important de se rappeler que les jeunes ne forment pas un groupe homogène. Bien qu’il puisse y avoir de grands thèmes sous-jacents aux raisons expliquant leur consommation ou non de cannabis, nous devons être conscients que le vécu, les facteurs de stress, et les aspects de l’identité propres à chaque jeune personne peuvent influer sur ses choix concernant la consommation de cannabis. Lors de vos discussions sur le cannabis avec les élèves, évitez les suppositions et facilitez des conversations ouvertes qui ne portent pas de jugement.

Pour des suggestions pour la facilitation de conversations ouvertes, consultez nos guides de discussion : Éducation sur le cannabis : lancez la discussion (élémentaire et secondaire).

Les raisons pour lesquelles certains jeunes choisissent de consommer du cannabis

Les raisons données pour la consommation de cannabis peuvent être classées en trois grandes catégories3:

L’influence des personnes importantes

Les jeunes rapportent diverses raisons relatives à l’influence de personnes importantes dans leur vie. Les raisons les plus communes pour la consommation sont l’influence des pairs et la pression exercée par les pairs.4 Certains expliquent que la consommation de cannabis est une façon de s’intégrer à un groupe d’amis, qu’il s’agit d’une activité à faire avec eux, d’atténuer l’anxiété sociale, ou de combattre l’ennui. Pour d’autres, le cannabis est un acte de rébellion contre les adultes ou une façon d’établir une identité ou d’être considéré comme « plus amusant ». De plus, certains rapportent l’influence de leurs frères, sœurs, ou parents qui fument du cannabis, ou le manque d’une figure d’autorité.3

« Je connais quelqu’un qui en fume parce qu’il croit que les autres pensent qu’il n’est pas amusant quand il est sobre, parce que quand il avait consommé, il était très animé et stimulé par les choses. ».3 – Participant à un groupe de discussion (2017)

Les garçons et les filles rapportent en gros les mêmes raisons pour leur consommation de cannabis, et disent ne pas s’attendre à ce que les raisons diffèrent selon le sexe. Cependant, les garçons rapportent le besoin de « suivre » leurs pairs de sexe masculin. Par exemple, ils peuvent être plus susceptibles de « vider » un bong ou d’inhaler plus profondément en raison de la pression exercée par leurs pairs, augmentant ainsi leur risque d’une surconsommation.4 Ce type de pression pour participer à une activité compétitive de consommation de cannabis n’a pas été rapporté par les filles, et aucune donnée ne fut recueillie pour des jeunes s’identifiant à un autre genre.4

Disponibilité et acceptabilité

Avant la légalisation, les jeunes estimaient que le cannabis était aisément accessible et même possiblement plus aisément accessible que l’alcool. Par exemple, certains ont rapporté qu’il n’était pas rare de trouver du cannabis lors des fêtes à domicile et d’activités sociales.3

La disponibilité du cannabis renforce la perception de l’acceptabilité sociale de la consommation de cannabis par les jeunes.3 Le manque de conséquences pour la consommation de cannabis3 et le portrait positif dépeint4 dans les médias et en ligne concernant sa consommation sont d’autres facteurs qui renforcent l’acceptabilité.

Une participante a mentionné que lorsqu’elle était jeune, elle savait toujours que les « plus vieux » consommaient du cannabis, mais elle ne les a jamais vus en subir les conséquences, alors lorsqu’on lui en a offert, elle a tenu pour acquis que « ce n’était pas très grave ».3

Effets positifs sur le corps et l’esprit

L’automédication est une raison courante pour l’utilisation. Les jeunes expliquent qu’ils utilisent le cannabis pour échapper au stress, à l’anxiété, et à la dépression, et pour les aider à dormir et pour gérer la douleur chronique. De plus, certaines filles ont rapporté qu’elles consommaient du cannabis pour favoriser la perte de poids.4

« Bien, personnellement, la dépression, je trouve que pour moi [le cannabis] fonctionne mieux qu’un antidépresseur. Quand je ne suis pas gelé, je trouve que je [ne] suis [pas] aussi déprimé que quand les pilules ne fonctionnent pas. ».3 – Participant à un groupe de discussion (2017)

D’autres effets positifs rapportés sont l’amélioration de l’appétit, du rendement, de l’humeur, et un plus grand plaisir à faire une activité. De plus, les jeunes croient que le cannabis est la drogue la plus sécuritaire, saine, et naturelle pour le corps et l’esprit.3

Les raisons pour lesquelles certains jeunes choisissent de NE PAS consommer du cannabis

La majorité des élèves ne consomment pas de cannabis1, et leurs raisons peuvent être classées en quatre grandes catégories3:

Peur des conséquences

Quelques conséquences peuvent dissuader les jeunes de consommer du cannabis. Par exemple, quelques-uns craignent ce que penseraient leurs parents ou la possibilité d’être punis s’ils se faisaient prendre à consommer du cannabis..3 Certains craignent des problèmes juridiques, la possibilité d’être entraînés dans des situations compliquées en tentant d’obtenir du cannabis, ou le risque de développer une dépendance, ou qu’une autre substance dangereuse soit mélangée avec le cannabis.4 Certains choisissent de ne pas consommer de cannabis parce qu’ils ont déjà éprouvé des conséquences ou été témoin de mauvaises expériences chez d’autres personnes.3

Les filles en particulier rapportent des préoccupations concernant la possibilité d’un « mauvais délire » et leur sécurité lorsqu’elles ont les facultés affaiblies, comme le risque d’une agression sexuelle.

Effets négatifs sur le corps et l’esprit

Bien que les jeunes rapportent les effets positifs comme l’une des raisons pour consommer du cannabis, ils reconnaissent aussi des effets négatifs comme dissuasifs. Par exemple, ils mentionnent les effets négatifs sur le cerveau, le cœur, et les poumons, ainsi que la fatigue, la faim, et un sentiment d’inconfort. Ils rapportent des changements négatifs dans les pensées, les comportements, l’attitude, et les capacités athlétiques.3 Les jeunes sont aussi préoccupés par le danger de la conduite avec les facultés affaiblies par le cannabis et le potentiel du cannabis à déclencher des maladies mentales.4

« Je le faisais pratiquement tous les jours, comme huit fois, sinon plus, alors quand j’arrêtais de le faire, ça a entraîné des problèmes de santé mentale dans moi… j’ai eu un diagnostic de dépression et anxiété provoquées par la drogue et je n’avais jamais eu rien du genre avant. »3– Participant à un groupe de discussion (2017)

Les garçons et les filles s’entendent généralement sur les méfaits cités ci-dessus. Cependant, lorsque des questions plus précises sont posées, les filles ont tendance à donner plus d’exemples que les garçons.4

Stigmatisation des personnes qui consomment du cannabis

Les jeunes reconnaissent que les personnes qui consomment du cannabis sont souvent stigmatisées. De plus, ils reconnaissent que plus la consommation est fréquente, plus la personne est stigmatisée.3

« On m’a déjà appelé un poteux et un drogué et un vaurien dégénéré… tout ça…et puis moi, pas pour me vanter, mais je suis très intelligent par opposition à ce qu’ils ont dit avant. ».3 - Participant à un groupe de discussion (2017)

Les filles sont préoccupées par l’idée d’être stéréotypées comme étant « vulgaires » si elles consomment du cannabis. Elles s’attendent à être jugées de façon sévère par leurs pairs si elles sont perçues comme une personne qui consomme régulièrement du cannabis. Les garçons rapportent le risque que peut poser la consommation de cannabis sur leurs projets, comme leur réussite scolaire et des bourses d’études pour les athlètes.4

Opinions sur la consommation de substances

En dernier lieu, certains jeunes choisissent de ne pas consommer de cannabis, car cela va à l’encontre de leurs croyances ou que cela ne fait pas partie de leur être.

« Je sais pas. Je pense que certaines personnes sont vraiment contre ce genre de chose et, comme, leur morale et leurs croyances sont juste… Ils n’y croient tout simplement pas, alors ils n’en font pas, comme ça. »3 –Participant à un groupe de discussion (2017)

Le rôle du personnel enseignant pour aider les élèves à faire des choix judicieux.

Les jeunes ont des connaissances importantes et devraient pouvoir s’exprimer sur les interventions pour lesquelles ils sont ciblés. Dans cette section de la chronique, nous allons examiner les perceptions des jeunes sur des approches de prévention et des suggestions concernant des choses à améliorer.

Des renseignements équilibrés et objectifs reposant sur des données probantes

Les jeunes reconnaissent que le cannabis peut avoir des effets sur la santé de leur corps et de leur cerveau, et souhaitent en apprendre davantage sur la science qui explique ces effets. Ils reconnaissent aussi qu’il peut y avoir des effets positifs et négatifs, et souhaitent connaître les deux côtés de la médaille par une approche neutre reposant sur des données probantes.3

Ils disent qu’il faut éviter les approches extrêmes ou moralisatrices comme « Dites non à la drogue » ou des vidéos ou images explicites. Selon eux, les assemblées ou les présentations en classe où des figures d’autorité « leur parlent » sont inefficaces et sont rapidement oubliées. Ils veulent plutôt avoir plus de possibilités de participer à des discussions sur le cannabis, et veulent recevoir de l’information sur une variété de sujets pertinents, comme l’effet du cannabis sur les jeunes qui s’approchent de l’âge adulte, son effet sur le cerveau, les risques de la conduite avec les facultés affaiblies, la possibilité de développer une dépendance ou des problèmes de santé mentale, et des stratégies pour cesser d’en consommer. De plus, ils suggèrent que l’éducation sur la prévention devrait commencer avant le secondaire et se poursuivre tout au long de leur éducation pour qu’ils ne l’oublient pas.3

Il est aussi important de se rappeler que les jeunes font leur propre recherche en ligne et qu’ils trouvent des informations contradictoires. Ils rapportent que ces informations incohérentes représentent un obstacle à leur apprentissage sur le cannabis. Étant donné la quantité importante d’informations provenant de diverses sources, ils peuvent choisir celles qui leur conviennent à un moment précis ou tout simplement mettre en doute l’ensemble des informations.3 Le personnel enseignant a la possibilité d’aider les élèves à identifier des sources crédibles et à évaluer de manière critique les informations en ligne.4

Êtes-vous à la recherche de sources crédibles pour votre perfectionnement professionnel sur la consommation de cannabis à des fins non médicales? Consultez les ressources ci-dessous.

Une approche axée sur la réduction des méfaits

En leur fournissant des informations reposant sur des données probantes, nous pouvons aider les jeunes à prendre des décisions éclairées concernant leur santé. Cependant, les jeunes le confirment : peu importe les efforts de prévention, il y aura toujours des jeunes qui consommeront du cannabis. Cela signifie que les stratégies de réduction des méfaits sont essentielles pour interpeller les jeunes qui consomment du cannabis.

Bref, une approche axée sur la réduction des méfaits offre des options aux personnes qui consomment des substances pour minimiser les méfaits par des moyens non contraignants et non moralisateurs afin de renforcer les habiletés et les connaissances pour mener une vie plus saine et sécuritaire.5

Consultez cette chronique pour en apprendre davantage sur l’approche axée sur la réduction des méfaits dans les écoles et les activités connexes en classe.

Consultez La vérité crue : Conseils pratiques sur la consommation plus sûre de cannabis pour une ressource sur la réduction des méfaits que vous pouvez partager avec vos élèves.

La facilitation de discussions non moralisatrices

La légalisation du cannabis a été un élément catalyseur pour des discussions entre les jeunes et leurs parents4, et nous savons que des conversations ont également lieu dans les écoles. Les jeunes rapportent que les conseillers scolaires sont disponibles pour discuter des préoccupations relatives au cannabis. Cependant, ils ne sont pas tout à fait à l’aise avec cette option par crainte d’être jugés, de se faire couvrir de honte, ou d’avoir des ennuis.4 Cela nous indique que nous en avons encore beaucoup à apprendre sur la facilitation de conversations ouvertes et non moralisatrices avec les élèves. Consultez les ressources citées dans cette chronique pour de l’aide.

Cette ressource propose trois exercices pour vous préparer à ces discussions : Parler pot avec les jeunes : Un guide de communication sur le cannabis pour les alliés des jeunes

Pour en apprendre davantage

Pour de plus amples renseignements, consultez les ressources suivantes :

Pour consulter notre éventail de ressources d’éducation sur le cannabis, visitez carrefourpedagogique.ophea.net/ressources/ressources-deducation-sur-le-cannabis

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Ophea et le Programme de soutien au système provincial du Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH)

Bibliographie

1Boak, A., Elton-Marshall, T., Mann, R.E., & Hamilton, H. A. (2020). Drug use among Ontario students, 1977-2019: Detailed findings from the Ontario Student Drug Use and Health Survey (OSDUHS) (avec résumé du rapport sur la consommation de drogues : SCDSEO 2019). Toronto, ON: Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH). Récupéré de : https://www.camh.ca/-/media/files/pdf---osduhs/drugusereport_2019osduhs-pdf.pdf?la=en&hash=7F149240451E7421C3991121AEAD630F21B13784.

2Gouvernement du Canada. (2019). Enquête canadienne sur le tabac, l’alcool et les drogues chez les élèves. Récupéré de : https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/enquete-canadienne-tabac-alcool-et-drogues-eleves.html

3McKiernan, A. et Fleming K. (2017). Les perceptions des jeunes Canadiens sur le cannabis. Centre canadien de lutte de contre les toxicomanies. Récupéré de : https://www.ccsa.ca/sites/default/files/2019-04/CCSA-Canadian-Youth-Perceptions-on-Cannabis-Report-2017-fr.pdf

4Goodman, A. (sous presse). Preliminary qualitative data from the Gendered Canadian Youth Perceptions on Cannabis study. Ottawa, Ont.: Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances.

5Association canadienne pour la santé mentale. (s.d.). Harm Reduction. Récupéré de : https://ontario.cmha.ca/harm-reduction/